J'ai lu le livre deux fois, préparé soigneusement l'interview, passé plus d'une heure avec l'auteur et mis deux jours à écrire l'article. Tout ça pour 244,50 euros, congés payés et 13e mois compris, même si c'est illégal, avec en plus un abattement sur les charges pour lequel le magazine avait pourtant l'obligation de me demander mon autorisation, que je n'aurais d'ailleurs pas donnée. Le magazine en question est "engagé", c'est-à-dire qu'il pourfend haut et fort les méchants employeurs qui maltraitent leurs salariés. C'est comme ça, les titres les plus militants sont souvent les moins réglo.
Ça, c'est pour l'aspect financier. Il est important, parce que ces situations sont de plus en plus fréquentes. Avec la crise, qui a drôlement bon dos en ce moment, mes collaborations s'amenuisent. Je les remplace mais hélas, pas au même tarif ! Vaut-il mieux travailler beaucoup plus pour le même prix ou ne pas travailler ? Je commence à me poser la question !
Au-delà de l'aspect financier, il y a une certaine humiliation dans ces conditions de travail, humiliation qui, les mauvais jours – vous aurez deviné qu'aujourd'hui, ce n'est pas la grande forme –, m'amène à penser que mon travail ne vaut peut-être pas grand chose.
(C'était la minute plaintive, je vous remercie de m'avoir écoutée et je me remets au boulot.)